Réformes des retraites: ce qu'il s'est vraiment passé en coulisses du front syndical

20/01/2023

Les syndicats, réformistes ou contestataires, sont unis contre la réforme des retraites et ont appelé ensemble à manifester contre le recul de l'âge légal de départ à 64 ans ce 19 janvier. Une première depuis douze ans, qui a exigé des concessions dans tous les camps et une coordination des modes d'action.

Ils promettent la chienlit à Emmanuel Macron ces deux prochains mois. "Il faut que la mobilisation soit du niveau de 1995", tonne Philippe Martinez, le secrétaire général de la CGT. Une référence à la dernière grande victoire des syndicats sur le terrain des retraites, lorsqu'Alain Juppé avait dû renoncer à sa réforme des régimes spéciaux et des fonctionnaires en 1995.

Pas question de se laisser prendre de vitesse par le gouvernement, qui veut voir la réforme votée d'ici à la fin mars. Quelques minutes après l'annonce d'Elisabeth Borne du recul de l'âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans le 10 janvier, les leaders des huit syndicats hexagonaux se retrouvaient à la Bourse du travail, à Paris, pour dévoiler la première date des grèves et des manifestations, le 19 janvier. Une grande première depuis 2010.

"Les organisations syndicales n'ont jamais été aussi soudées que sur cette réforme des retraites", décrypte Pierre Ferracci, président du groupe de conseil Alpha et expert des relations sociales. "Le gouvernement aurait tort de penser que c'est un feu de paille."

Pétition contre la réforme des retraites

Preuve en est la pétition pour soutenir le mouvement syndical qui a récolté plus de 440.000 signatures en à peine une semaine. Un signe que les syndicats ont une carte à jouer pour capter la colère des Français majoritairement opposés, selon les sondages, au recul de l'âge de la retraite à 64 ans. CGT et CFDT se rapprochent.

Retour aux 60 ans?

En coulisses, l'édification de l'unité syndicale n'a pourtant pas été une sinécure. "Nous avons dû mettre au placard nos différends idéologiques pour construire un front commun", commente Cyril Chabanier, le secrétaire général de la CFTC. Pas simple tant les vieux réflexes ont la peau dure chez les syndicats les plus contestataires.

"Début janvier, la CGT a essayé de faire cavalier seul en mettant l'accent sur le retour aux 60 ans comme âge de départ", relate Dominique Andolfatto, spécialiste des syndicats et professeur à l'université de Bourgogne. En off, un syndicaliste commente: "Certes, certains peuvent être tentés de jouer leur propre partition. Mais les attaques du gouvernement contre notre modèle social sont si violentes que même la CFDT et la CGT, deux syndicats que tout oppose, arrivent aujourd'hui à faire des actions communes!"

Rapprochement consolidé, avant LFI

Le rapprochement entre les leaders de la CFDT et de la CGT, Laurent Berger et Philippe Martinez, s'est consolidé au cours des derniers mois. Depuis juillet, ils se sont réunis à plusieurs reprises pour signer des communiqués communs sur le pouvoir d'achat et contre la réforme de l'assurance-chômage. "Le dialogue est fluide entre nous, souffle Yvan Ricordeau, référent retraites de la CFDT. Quelques coups de fil ont suffi pour se mettre d'accord sur le principe d'une mobilisation générale."

Les patrons des deux centrales parient en outre que leurs organisations ont tout à gagner à cette union. Les syndicats connaissent une crise existentielle", relate Raymond Soubie, président d'Alixio. " Montrer qu'ils peuvent lutter ensemble contre la réforme des retraites est un enjeu de survie."

Le choix de la date de la première grande manifestation du 19 janvier ne doit d'ailleurs rien au hasard. Les syndicats ont damé le pion à Jean-Luc Mélenchon et La France insoumise, qui avaient prévu une grande marche le 21 janvier, et ont ainsi sciemment montré qu'ils étaient le fer de lance de la contestation.

"Caisses de grèves"

Reste à organiser la mobilisation sur le terrain. Depuis une dizaine de jours, les centrales passent les instructions à leurs unions régionales et départementales. Les tracts sont imprimés, les enceintes de sonorisations louées. Et les chasubles et drapeaux aux couleurs des centrales sont distribués avec soin. En parallèle, les syndicats ont réactivé les fameuses "caisses de grèves", qui permettent de compenser les pertes de salaires des militants actifs dans le mouvement.

La CGT assure avoir déjà récolté quelque 100.000 euros de dons en moins d'une semaine. Pour les syndicalistes, le principal défi est d'installer le mouvement dans la durée. Les syndicats réformistes prônent une diversité de manifestations. "On prévoit des défilés le week-end pour préserver le pouvoir d'achat des grévistes dans un contexte de forte inflation, détaille Laurent Escure, secrétaire général de l'Unsa. On va faire des happenings devant les permanences parlementaires des députés de la majorité."

Trop "soft"?

Des modes d'action trop "soft" pour les militants des fédérations les plus dures de la CGT. Surtout à l'approche d'un congrès périlleux en mars où doit se décider la succession de Philippe Martinez. "C'est la course à qui sera le plus contestataire", décrypte Bernard Vivier, directeur de l'Institut supérieur du travail.

La fédération de la chimie (Fnic-CGT) promet déjà le blocage de raffineries comme à l'automne dernier. Celle de l'énergie veut aller plus loin encore en coupant l'électricité aux élus qui soutiendront la réforme. "S'ils ne veulent rien entendre, on les ciblera", menace Sébastien Menesplier, le secrétaire général de la CGT-Energie.

Le mouvement devrait aussi être très suivi à la RATP. Car en plus du report de l'âge de départ à la retraite, la réforme met fin au recrutement au statut. De quoi chauffer à blanc les militants qui pourraient comme en 2019 bloquer l'Ile-de-France pendant plusieurs semaines. Sans compter les mobilisations spontanées comme celle des contrôleurs de la SNCF qui ont fait grève à Noël, débordant les syndicats. Pour le gouvernement, la menace peut venir de partout.

Source : Challenges

La pétition contre la réforme des retraites a franchi mercredi 18 janvier le cap des 500 000 signatures

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